LES PORTES-AVIONS partie 1

LES PORTES-AVIONS partie 1

HISTORIQUE DES PORTES-AVIONS


HISTOIRE DES PORTES-AVIONS D'HIER À AUJOURD'HUI

Un porte-avions ou un porte-aéronefs (aussi écrit porte-avion et porte-aéronef) est un navire de guerre permettant le lancement et la réception d'aéronefs (avions de combat, hélicoptères) à partir de son pont. Ces bâtiments sont dotés d’une puissance militaire considérable dont les capacités multiples en font des instruments d’une grande souplesse d’utilisation militaire ou diplomatique.

Capables d’assurer une projection de puissance garantissant une supériorité aérienne depuis la mer et sur la terre, les porte-avions sont de véritables bases aériennes pouvant se déplacer de mille kilomètres par vingt-quatre heures. Ils permettent de placer une force aérienne autonome pratiquement en n'importe quel endroit du globe.

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Vue d'artiste de l'USS Gerald R. Ford (CVN-78), tête de sa classe, le plus gros porte-avions en service à l'horizon 2015

Ce sont généralement de très grands navires et de véritables villes flottantes nécessitant un équipage de souvent plusieurs milliers de marins. Le porte-avions est généralement le centre d'un groupe aéronaval constitué de plusieurs types différents de navires de guerre assurerant autour du groupe un espace de sécurité aérienne, en surface et sous-marine. En raison d’un entretien extrêmement complexe et coûteux, l'exploitation d’un porte-avions est réservée à quelques rares États disposant des moyens industriels et d’un budget de défense importants.

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Photo de groupe de porte-avions, porte-aéronefs et porte-hélicoptères d'assaut : le STOBAR CV Principe de Asturias, l'USS Wasp (LHD-1), le CATOBAR CV USS Forrestal et le STOBAR CV HMS Invincible (7 octobre 1991)

Par sa puissance, sa mobilité, son autonomie et la variété de ses moyens, le porte-avions est souvent la pièce maîtresse des flottes de combat modernes. Sur le plan tactique, voire stratégique, il a remplacé le bâtiment de ligne dans le rôle de navire amiral. L'un de ses gros avantages est qu'en naviguant dans les eaux internationales, il n'occasionne aucune ingérence dans une quelconque souveraineté territoriale et permet de ce fait de s'affranchir des autorisations de survol de pays tiers (dont l'obtention peut prendre plusieurs semaines même avec un pays ami, ou pire être refusée), de réduire les temps et distances de transit des avions et par conséquent d'augmenter considérablement le temps de disponibilité sur la zone de combat.

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Henry Kissinger  1923

Dès qu'une crise internationale se profilait, Henry Kissinger, le secrétaire d'État américain de 1973 à 1977 et Prix Nobel de la paix en 1973 pour son action dans la résolution de la guerre du Viêt Nam et de la guerre du Kippour, ouvrait rituellement les réunions du conseil national de sécurité par la phrase : où sont les porte-avions ? Il clamait aussi : un porte-avions c'est 100 000 tonnes de diplomatie.

Un porte-avions est constitué des éléments suivants : un pont d'envol plat constitué de deux pistes (une piste axiale et une piste latérale) permettant le catapultage et l'appontage de son parc aérien ; un îlot, placé sur tribord du pont d'envol et servant entre autres de tour de contrôle ; des ascenseurs permettant les mouvements des aéronefs (avions et hélicoptères) entre le pont d'envol et les hangars ; sous le pont d'envol, on trouve les hangars où sont garés les avions et où s'effectue leur entretien, les soutes à carburant et à munitions, les logements du personnel et les machines fournissant l'énergie et assurant la propulsion ; sur le pont d'envol se trouvent les catapultes permettant de donner aux avions une accélération au décollage ainsi que les brins d'arrêt pour le freinage à l'appontage.

À la différence d'un porte-avions, un porte-aéronefs ne possède pas de catapulte. Il met en œuvre des avions à décollage court au moyen d'un tremplin situé sur l'avant du pont d'envol, ou à décollage vertical. Selon le type d'avions embarqués il peut posséder ou non des brins d'arrêt. Si le porte-aéronefs n'est pas équipé de brins d'arrêt, les avions se posent sur son pont, en vol stationnaire à la manière d'un hélicoptère.

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Le porte-avions américain USS Lincoln et ses navires d'accompagnement

Ce type d'avions à décollage court ou vertical permet d'utiliser des plateformes moins vastes que celles des porte-avions, donc de construire des bâtiments de plus faible tonnage au coût de construction et de maintenance moins élevé. En contrepartie, ces avions, qui consomment une grande quantité de carburant pour apponter ou décoller, sont handicapés par leur plus faible autonomie en vol qui limite leur rayon d'action et leur capacité d'emport.

Élément majeur de la force navale, le porte-avions est un bâtiment précieux. Aussi est-il escorté par d'autres unités de combat qui assurent sa protection : croiseurs, frégates antiaériennes, frégates anti-sous-marines, chasseurs de mines et sous-marin nucléaire d'attaque. Pour le ravitailler, ainsi que son escorte, il est accompagné d'un ou plusieurs pétroliers ravitailleurs d'escadre. Cette force opérationnelle destinée à une projection de puissance constitue un groupe aéronaval.

Sa vulnérabilité fait que la pertinence du porte-avions a souvent été (et est encore) contestée, notamment parce qu'il mobilise un grand nombre de bâtiments d'escorte. De même, les catapultes constituent le talon d'Achille du porte-avions. Ce matériel est très complexe et en cas de panne ou d'avarie de combat, certes le porte-avions reste à flot mais il a perdu toute sa valeur opérationnelle, ne pouvant plus mettre en œuvre son aviation embarquée.

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 Image de bâtiments de 5 nations engagées dans l'opération Enduring Freedom en mer d'Arabie. En 4 colonnes, de en haut à gauche à en bas à droite : ITS Maestrale (F 570), FS De Grasse (D 612), USS John C. Stennis (CVN 74), USS Port Royal (CG 73), FS Charles de Gaulle (R 91), HMS Ocean (L 12), FS Surcouf (F 711), USS John F. Kennedy (CV 67), HNLMS Van Amstel (F 831), et ITS Luigi Durand de la Penne (D 560) (18 avril 2002)

Mais les multiples opérations militaires qu'il permet d'accomplir font de ce type de bâtiment un atout irremplaçable pour les gestions de crise. Pouvant opérer à partir des eaux internationales, il évite les longues, délicates et incertaines tractations diplomatiques, destinées à obtenir d'États tiers, limitrophes des zones de crise ou de conflit, des autorisations de survol et de stationnement éventuel sur leur sol.

En raison des moyens qu’ils permettent de mettre en œuvre (de 20 à 90 avions et hélicoptères), les porte-avions sont les plus gros navires de guerre existants. Afin d'augmenter leur autonomie et d'éviter de fréquents ravitaillements à la mer, certains porte-avions sont à propulsion nucléaire. Remontant au début des années 1960, ce type de propulsion est à présent parfaitement maîtrisé après avoir connu divers problèmes de jeunesse tels que le danger des radiations, les fuites éventuelles, la vulnérabilité des chaufferies, et un entretien spécifique. La propulsion nucléaire ne supprime pas le besoin de ravitailler le navire en carburant pour ses avions, mais elle permet d'embarquer davantage de kérosène qu'un porte-avions à propulsion classique, en utilisant la capacité des soutes à gazole dont il n'a pas besoin au profit de son parc aérien.

Classification des porte-avions

AV : Seaplane Tender, transport d'hydravions (désignation désuète)

CV : Carrier Vessel, porte-avions à propulsion classique [i.e. : non nucléaire]

CVL : Light aircraft carrier, porte-avions léger (plus utilisé)

CVE : Carrier Vessel Escort, porte-avions d'escorte (plus utilisé)

CVH : Helicopter Aircraft Carrier, porte-aéronefs apte seulement à la mise en œuvre d'appareils ADAV/ADAC

CVN : Carrier Vessel Nuclear, porte-avions/aéronefs à propulsion nucléaire ;

CVS : ASW Support Aircraft Carrier, porte-aéronefs à vocation prioritaire de lutte anti-sous-marine

CVSG : porte-aéronefs à vocation prioritaire de lutte anti-sous-marine et armé de missiles antinavires (ne s'applique qu'à la classe Kiev et n'est plus utilisé)

CATOBAR : Catapult Assisted Take Off But Arrested Recovery, avec catapultes et avec brins d'arrêt ; permet la mise en œuvre d'avions conventionnels (mais navals ou navalisés),

STOBAR : Short Take-Off But Arrested Recovery, tremplin et brins d'arrêt ; permet aussi la mise en œuvre d'avions conventionnels (i.e. : terrestres), mais avec moins de souplesse qu'un CATOBAR (direction et force du vent plus contraignantes) ; unique exemple actuel : le PA russe Amiral Kouznetsov

STOVL : Short Take-Off, Vertical Landing, dispose d'un tremplin ; apte seulement à la mise en œuvre d'appareils ADAV/ADAC

DDH : destroyer porte-hélicoptères

LHD : Landing Helicopter Dock, porte-aéronefs à pont d'envol continu, disposant d'un grand radier

LHA : Landing Helicopter Assault, porte-aéronefs à pont d'envol continu, disposant d'un petit radier

LPH : Landing Platform Helicopter, porte-hélicoptères à pont d'envol continu, sans radier (plus utilisé).


30/12/2014
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PREMIÈRES TENTATIVES 1910-1918

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Clément Agnès Ader, né le 2 avril 1841 à Muret et mort le 3 mai 1925 à Toulouse, est un ingénieur français, pionnier de l'aviation. Il aurait été le premier à faire décoller un engin motorisé plus lourd que l'air en 1890. Ce vol, antérieur à celui des frères Wright en 1903, est controversé en raison de doutes sur sa réalité et des caractéristiques de stabilité et de contrôle de l'appareil, le rendant quasiment incontrôlable dans l'air.

Alors que les plus lourds que l'air prennent leur essor au début du XXe siècle, plusieurs marines s'intéressent à leur utilisation à bord de leurs lourds navires de guerre. En 1909, l'inventeur français Clément Ader publie dans son ouvrage L'Aviation militaire la description de navires porte-avion  servant à l'observation, au torpillage des navires ennemis et à la protection du territoire national français. D'autre part, le remisage des avions devra nécessairement être aménagé sous le pont. L'accès s'effectue par un monte-charge obturé par une grande trappe à coulisse comprenant des joints étanches ne laissant pas filtrer l'eau. Ce procédé est appliqué sur les porte-avions actuels. Ader imagine aussi des cheminées rétractiles afin de laisser libre le pont pendant les manœuvres des avions. Ce système est essayé sur certains porte-avions japonais à partir des années trente. Ader décrit également le décollage et l'appontage des appareils vent debout tel qu'il est pratiqué de nos jours.

De l’utilité des plates-formes sur les cuirassés

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L’US Navy commence à s’intéresser à l’aviation à l’été 1910 et charge le capitaine Washington Irving Chambers  et ses adjoints William McEntee du Bureau of Construction and Repair et Nathaniel H. Wright du Bureau of Steam Engineering de la tenir au courant des progrès accomplis. Le premier décollage d'un avion en mer a lieu à titre expérimental dans la baie de Chesapeake le 14 novembre 1910, à bord du croiseur USS Birmingham de 3 750 tonnes équipé pour l'occasion d'une plate-forme de 24,60 × 7 mètres et inclinée à 5 %. C'est le pilote américain Eugene Ely qui réalise l'exploit à bord d'un biplan Curtiss 1911 modèle D, qui se pose à 4 km de là, sur la plage de Willoughby Spit (Virginie). Le secrétaire d’État à la Marine George von Lengerke Meyer  déclare peu après : Cette expérience et les progrès accomplis en aéronautique semblent indiquer que l’aviation est appelée à jouer un rôle dans la guerre navale du futur, même s’il n’est pas encore question de concevoir une plate-forme dédiée (on parle de plate-forme amovible installée sur les tourelles des cuirassés) tant que vous m’aurez montré qu’il est possible pour un aéroplane de se poser sur l’eau le long d’un cuirassé et d’être hissé à bord sans l’aide d’une quelconque plate-forme. Le 18 janvier 1911, Ely apponte avec le même avion sur la plage arrière de 36,4 × 9,6 mètres du cuirassé USS Pennsylvania  dans la baie de San Francisco (Californie). Glenn Curtiss amène le 17 février son hydravion le long du Pennsylvania et le fait hisser à bord.

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L’intérêt pour l’aviation navale est plus palpable en France et, surtout, au Royaume-Uni. Le premier navire spécifiquement destiné à emporter des aéronefs est le transport d'hydravions français Foudre, un croiseur de 6 000 tonnes, lancé en 1895, et qui est modifié pour son nouveau rôle entre 1911 et 1912. Lors des grandes manœuvres navales de mai 1914, une douzaine d'hydravions équipés de la TSF est affectée à des missions de reconnaissance jusqu'à 200 km sur divers points de la mer Méditerranée, principalement à Toulon et à Bizerte (Tunisie).

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Charles Rumney Samson 1883-1931

Le lieutenant Charles Rumney Samson est le premier à décoller à bord d’un biplan Short S.38 d'un navire en mouvement (18 nœuds), le cuirassé HMS Hibernia, le 2 mai 1912. Refusant cependant en 1912 la construction d’un bâtiment de 15 000 tonnes et 130 mètres de vol doté de deux ponts puis d’un autre de 20 000 tonnes avec pont continu (flush-deck) de 150 mètres, la Royal Navy préfère adjoindre une plate-forme fixe à des navires existants, dont le croiseur HMS Hermes transformé en transport d'hydravions en 1913 (et comprenant le premier aéronef à voilure repliable, un Short Admiralty 184) puis, à partir de mai 1915, les HMS Arethusa, ses navires sœurs Aurora, Penelope et Undaunted, plus le Caledon, le Dublin, le Yarmouth et le Cassandra.

La Première Guerre mondiale et les premiers porte-avions

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L'HMS Argus au mouillage, en livrée de camouflage Dazzle.

La 1reattaque aéronavale de l’histoire a lieu en septembre 1914 à partir du transport d'hydravions Wakamiya (ex-Lethington) de 7 720 tonnes de la Marine impériale japonaise contre la baie de Jiaozhou, une concession de l’Empire colonial allemand en Chine continentale. Quatre hydravions Maurice Farman bombardent les cibles allemandes (centres de communication et de commandement) et coulent un mouilleur de mines dans la péninsule de Tsingtao jusqu’au 6 novembre 1914, date à laquelle les Allemands se rendent.

Sur le front occidental, le 1er raid aéronaval a lieu le 25 décembre 1914 lorsque 12 hydravions des HMS Engadine, Riviera  et Empress attaquent préventivement la base de Zeppelin de Cuxhaven. Le raid, qui n’est pas un succès total en dépit du bombardement du croiseur SMS Von der Tann démontre la faisabilité d’une attaque aéroportée par voie des mers. Dès mai 1915, la marine russe déploie plusieurs transports d'hydravions (l’Almaz, l’Imperator Alexander I et l’Imperator Nicolaï) lors des opérations menées contre les Turcs en mer Noire (renforcés à l’hiver 1917 par des unités de la flotte roumaine, le Romania, le Regele Carol, le Dacia et l’Imperator Traian embarquant des Grigorovich M-9). Le 12 août 1915, l'HMS Ben-my-Chree  lance un hydravion Short Type 184 pour attaquer un navire turc de 5 000 tonnes en mer de Marmara tandis que le 6 février 1916, les avions de l’Imperator Nicolaï et de l’Imperator Alexander I envoient par le fond le cargo turc Jamingard, le plus gros navire marchand jamais coulé durant la guerre.

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Le HMS Furious avec à bord des Sopwith Camel avant l'attaque sur Tonder (juillet 1918)

Au Royaume-Uni, la traque des Zeppelin de reconnaissance allemands devient systématique à partir de 1915 avec des patrouilles quotidiennes à 80 km des côtes. Mais les transports d’hydravions, assez anciens, sont à la peine. Conçu pour accueillir 4 hydravions de reconnaissance et 4 chasseurs monoplaces, le croiseur HMS Furious de 22 000 tonnes est modifié et mis en service le 26 juin 1917 avec l’adjonction d’un pont continu de 70 mètres, rallongé à partir du 14 novembre à 90 mètres. Doté d’un hangar couvrant cette longueur et de 2 ascenseurs électriques, il embarque 16 aéronefs (Sopwith Pup, Sopwith Camel et Sopwith 1½ Strutter) et peut être considéré comme le premier porte-avions. Il compte à son actif le 1er appontage sur un navire en mouvement sur Sopwith Pup le 2 août 1917 et l’attaque, le 19 juillet 1918, d’une usine de Zeppelin à Tønder (Danemark) et la destruction d'un Z-54 et d'un Z-60 par 7 Sopwith Camel. Cependant, peu avant la fin de la guerre, le 6 septembre 1918, est commissionné l'HMS Argus de 15 750 tonnes, le premier porte-avions conçu dès l'origine pour recevoir un pont continu (sans îlot) de 160x26 mètres. Il met en œuvre 20 aéronefs, dont des Sopwith Camel et des avions d'attaque Sopwith Cuckoo.

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C’est à partir du transport d'hydravions Wakamiya qu’est conduit le 1er raid aéronaval en septembre 1914

L'essor du porte-avions (1919-1935)

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Le 11 juillet 1921, les grandes puissances décident de se rencontrer afin de décider de la limitation des armements navals. Une conférence, du 12 novembre 1921 au 6 février 1922, aboutit au traité de Washington. En plus d'une limitation en tonnage global, le nombre de porte-avions de plus de 27 000 et de moins de 33 000 tonnes est limité à deux par pays. Étant donné que la plupart des marines dépassent le tonnage autorisé des navires de bataille et sont sous les quotas en ce qui concerne les porte-avions, nombre de croiseurs en construction sont transformés en porte-avions. Néanmoins, les marines européennes ne s'intéressent pas toutes à la projection de forces dans l’océan Atlantique et donc à la construction de porte-avions. La Kriegsmarine allemande préfère la guerre de course avec des croiseurs et cuirassés rapides tandis que la Regia Marina italienne possède des porte-avions naturels entre la Sardaigne, le bout de sa botte, la Sicile et ses bases en Afrique du Nord.

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L'USS Langley au large de San Diego avec des Vought VE-7SF  sur son pont

C’est autant valable pour la Marine nationale française qui se contente de transformer de 1923 à 1927 un seul cuirassé en porte-avions, le Béarn de 25 000 tonnes. Par contre, la Royal Navy, qui est chargée des opérations à travers le monde, a un besoin évident de porte-avions en plus des HMS Hermes et Eagle. Aux États-Unis, en 1922, le Congrès autorise la conversion d’un ancien charbonnier en porte-avions expérimental (qui n'est donc pas décompté des quotas) : disposant d'une catapulte à air comprimé, de brins d’arrêt et d'un ascenseur, le peu rapide USS Langley (CV-1) de 11 500 tonnes met en œuvre 34 avions et sert à tester les procédures liées à l’aviation embarquée. Bien que contraignant, le traité de Washington est une aubaine pour le contre-amiral William A. Moffett du Bureau of Aeronautics  (BuAer) qui présente en mars 1922 un « plan à cinq ans qui aboutit à la transformation des croiseurs USS Lexington et USS Saratoga (construits à 30 %) en porte-avions disponibles fin 1924. Les bâtiments de 36 000 tonnes ne sont cependant lancés que, respectivement, le 7 avril et le 3 octobre 1925. Lors du lancement de la tête de série, Moffett déclare : Je suis convaincu qu’une attaque lancée depuis de tels porte-avions, depuis un lieu tenu secret, à un moment tenu secret, vers un objectif tenu secret, ne peut être contrée. Il faut dire que les deux sisterships ont déjà toutes les caractéristiques des grandes unités des années 1950 : longs (271 mètres), larges (32 mètres), rapides (33 nœuds), dotés d'une étrave fermée, d’un pont élevé, d’un îlot conçu pour opérations de commandement et de contrôle, d’une hauteur de hangar importante, etc.

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William Adger Moffett (31 octobre 1869 – 4 avril 1933) est un amiral américain célèbre pour avoir participé à la création de l'aéronautique navale de l'US Navy.

De son côté, la Marine impériale japonaise convertit des navires inachevés (le cuirassé Kaga et le croiseur de bataille Akagi de 33 000 tonnes) en porte-avions pour se plier au traité. Avec l'aide des Britanniques, elle met en service le 27 décembre 1921 le Hosho de 10 500 tonnes, doté d'un îlot décalé sur tribord (supprimé deux ans plus tard) et de trois cheminées rétractables.

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L’USS Saratoga (1935)

Le Traité de Londres de 1930 et les forces en présence

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Le Shokaku lors de son commissionnement (25 septembre 1941)

En 1928, les appareils du Langley simulent une attaque sur Pearl Harbor qui démontre clairement les possibilités de l’aviation embarquée. De même, en janvier 1929, lors de l’exercice Fleet Problem IX, le Saratoga lance contre des installations du canal de Panama, une attaque de 83 avions à laquelle les avions de l’United States Army Air Corps sont incapables de s’opposer. Cependant, le Saratoga est virtuellement coulé lors de la contre-offensive qui s’ensuit. Pourtant, aucun enseignement n’est vraiment tiré de ces exercices. Du 21 janvier au 22 avril 1930, Moffett fait partie de la délégation américaine du Traité naval de Londres, aux termes duquel le quota de 135 000 tonnes sur les porte-avions est maintenu pour la marine américaine, à la condition qu’aucun nouveau bâtiment de moins de 10 000 tonnes ne soit construit. Dans les années 1930, l’US Navy met en service plusieurs porte-avions : le Ranger (CV.4) de 14 500 tonnes (17 577 tonnes à pleine charge) en 1934, le Yorktown (CV.5) en 1937 et son sistership Enterprise (CV.6) en 1938, tous deux de 19 900 tonnes. Le quota de tonnage accordé par les Traités permet de les compléter en 1940 par le Wasp (CV.7), un peu plus léger que ses prédécesseurs (14 700 tonnes). Enfin le Hornet de la classe Yorktown les rejoindra en 1941. On notera également l'expérimentation de dirigeables porte-avions dont trois exemplaires sont mis en service au cours de cette période, mais avec des résultats non probants.

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Jamais mis en service, le Graf Zeppelin lors de son lancement (8 décembre 1938)

Dans la seconde moitié des années 1930 la Royal Navy met en chantier cinq porte-avions : l'Ark Royal de 22 000 tonnes de déplacement ainsi que les quatre de la classe Illustrious (dont le HMS Illustrious, le HMS Formidable et le HMS Victorious).

Après la révocation du traité de Washington le 29 décembre 1934 par le Japon et l’échec de la 2e Conférence navale de Londres en décembre 1935, chacune des grandes puissances retrouve sa liberté, donnant aussitôt lieu à une reprise de la course aux armements. De 1935 à 1938, le Kaga et l'Akagi sont refondus tandis que sont lancés le Soryu de 19 500 tonnes (1935) et son sistership le Hiryu (1937) construits selon les quotas, le Shokaku de 32 105 tonnes et son sistership Zuikaku (1941), supérieurs à tout autre porte-avions au monde, avant l’apparition de la classe américaine Essex durant la guerre. Par ailleurs, la Kriegsmarine lance le 8 décembre 1938 le Graf Zeppelin de 33 550 tonnes, inspiré de l’Akagi, mais qui ne sera jamais armé.

La Seconde Guerre mondiale

La bataille de Narvik (1940)

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La dernière photo de l'HMS Glorious (8 juin 1940)

La principale raison ayant motivé l'Allemagne nazie à occuper la Norvège est la dépendance de son industrie vis-à-vis du minerai de fer suédois, qu'elle recevait des ports norvégiens dont Narvik. En sécurisant leur accès, l'Allemagne est en mesure de recevoir son approvisionnement en minerai et ce malgré le blocus maritime imposé par la Royal Navy. Par ailleurs, alors que la bataille de l'Atlantique prend de l'ampleur, le contrôle des aérodromes norvégiens, comme celui de Stavanger, devient d'une importance capitale, permettant aux avions de reconnaissance allemands d'opérer dans l'océan Atlantique Nord, sans avoir à survoler ou à longer les côtes britanniques. Le 9 avril 1940, l’Allemagne envahit la Norvège. La Royal Navy met sur pied la Task Force Z, qui comprend le HMS Furious. Cependant, après le déploiement de 90 bombardiers allemands basés à terre, la flotte anglaise se retire. Le lendemain, 16 Skua basés à terre attaquent le croiseur Koeningsberg à quai à Bergen. Au même moment, plusieurs destroyers britanniques coulent 2 destroyers allemands et avec le cuirassé Warspite en coulent 10 autres à Narvik. Alors que la flotte allemande prend le large, le Furious coule un U-boot dans un fjord voisin. Le 23 avril 1940, les Britanniques sont prêts à une contre-invasion à Trondheim et les HMS Ark Royal et Glorious catapultent des Skua pour fournir une couverture aérienne. Les Allemands réussissent à repousser l’attaque britannique et le Glorious et son escorte (les destroyers HMS Acasta  et HMS Ardent sont coulés avec environ 2 300 marins par les croiseurs de bataille Gneisenau et Scharnhorst alors qu’ils regagnent leur base de Scapa Flow. Finalement, la Kriegsmarine perd un croiseur lourd coulé par les batteries cotières, deux croiseurs légers, douze destroyers et six sous-marins, tandis que la Royal Navy perd un porte-avions, deux croiseurs, sept destroyers et un sous-marin.

L'opération Catapult (1940)

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Des Blackburn Skua sur le pont de l’HMS Ark Royal

Déclenchée dans la nuit du 2 au 3 juillet 1940 par la Royal Navy, l'opération Catapult vise à s’assurer que la flotte française ne puisse pas tomber aux mains des Allemands ou des Italiens. Son objectif était donc de s'emparer ou (à défaut) de détruire les bâtiments français, où qu’ils soient stationnés. Dans les ports de Plymouth et Portsmouth, les militaires anglais investissent les bâtiments français et procèdent aussitôt à leur désarmement. Sont ainsi saisis deux cuirassés, deux contre-torpilleurs, huit torpilleurs, six sous-marins, treize avisos et plus d'une centaine de bâtiments légers. Pour les Français, ce coup de force est injustifié, car les Allemands (et encore moins les Italiens) n'auraient pu capturer par la force des bâtiments français réfugiés dans des ports de guerre en Grande-Bretagne. De plus un certain nombre d'entre eux ne pouvaient appareiller car ils n'étaient plus en état de naviguer. Pour les Britanniques, doutant de l'application réelle par l'Allemagne des clauses de l'armistice, il importait surtout d'éviter que ces unités ne puissent retourner dans les ports de la France occupée.

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Sortie sous le feu de la Royal Navy des bâtiments de la Marine nationale française à Mers el-Kébir (3 juillet 1940). Le contre torpilleur Terrible dans les eaux du Volta

En parallèle à cette saisie, par la ruse et la force, des bâtiments français dans les ports de Grande-Bretagne, le croiseur de bataille HMS Hood, les cuirassés HMS Valiant et HMS Resolution et le porte-avions HMS Ark Royal accompagnés d’une escorte de croiseurs et de destroyers s’apprêtent, au matin du 3 juillet, à attaquer Mers el-Kébir (Algérie). En dépit des termes sans équivoque de l’ultimatum, l'escadre de la Marine nationale française, pourtant de puissance égale, mais en cours de désarmement, n’est pas préparée à l’attaque de leurs alliés de la veille. Amarrés « cul-à-quai » à la digue du port, l'artillerie principale des croiseurs de bataille Dunkerque et Strasbourg , armés chacun de 2 tourelles quadruples de 330 mm en chasse, a un champ de battage réduit vers la mer, d'où les bâtiments britanniques les canonnent. Les canons des bâtiments de la Royal Navy ouvrent le feu à distance maximale le 3 juillet 1940 et coulent le cuirassé Bretagne. Les navires de ligne Provence et Dunkerque ainsi que le contre-torpilleur Mogador sont gravement endommagés. Le croiseur de bataille Strasbourg s’échappe du port assiégé, escorté par 4 contre-torpilleurs. Les bâtiments sont attaqués deux fois par les obus de 380 mm des navires de ligne britanniques et les torpilles des avions torpilleurs Swordfish de l’Ark Royal mais le Strasbourg parvient à rejoindre Toulon le 4 juillet. Une nouvelle attaque aérienne, le 6 juillet au matin, coule par torpille le patrouilleur Terre Neuve, dont l’explosion endommage le Dunkerque.

Le 4 juillet, à Alexandrie (Égypte), concluant un accord entre l'amiral français René-Émile Godfroy et l'amiral britannique Andrew Cunningham, la flotte française évite le combat, sauvant ainsi le cuirassé Lorraine et les croiseurs Duquesne, Tourville et Suffren, trois torpilleurs, un sous-marin et surtout épargnant la vie de plusieurs centaines de marins.

Enfin, le 8 juillet, à Dakar (Afrique-Occidentale française), des Swordfish du HMS Hermes attaquent à la torpille (sans le détruire mais en l'immobilisant) le Richelieu, le plus moderne des cuirassés de la Marine nationale française déplaçant 35 000 tonnes. Finalement, 1 300 marins français trouveront la mort en une semaine au cours de l’opération Catapult, tués par leurs alliés de la veille.

La défense de Malte (1940-1942)

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Le HMS Formidable (1942)

En entrant en guerre aux côtés de l’Allemagne en 1940, l’Italie et sa puissante flotte menacent en mer Méditerranée l’approvisionnement britannique en pétrole d’Arabie. L’île de Malte est, à cet effet, un point stratégique et les porte-avions HMS Eagle, HMS Ark Royal et HMS Illustrious de la Royal Navy n’auront de cesse d’y transférer une aviation et d’escorter les convois de ravitaillement. Le 9 juillet 1940, l’Eagle lance des Fairey Swordfish contre les forces italiennes, coulant un destroyer. Dans la nuit du 11 au 12 novembre 1940, l’Illustrious lance 12 Swordfish contre la base navale italienne de Tarente (opération Judgement) coulant le Conte di Cavour, endommageant le Littorio et l’Andrea Doria. Une seconde vague de 9 Swordfish touche à nouveau le Littorio et également le Caio Duilio. Seulement 2 avions sont perdus durant l’opération et il est clair que la leçon de cette victoire est retenue par l’amiral Isoroku Yamamoto de la Marine impériale japonaise. L’Allemagne envoie 300 avions (Fliegerkorps X) sur des bases aériennes italiennes proches de la Méditerranée centrale, dont des Ju 87 Stuka et Ju 88, qui attaquent l’Illustrious le 10 janvier 1941, l’endommageant au point qu’il gagne les États-Unis pour réparations. Si bien que la Regia Marina pense (à tort) que la Royal Navy ne possède plus qu’un navire amiral sur zone et estime qu’une force de croiseurs lourds articulée autour du tout neuf cuirassé Vittorio Veneto est suffisante pour faire face aux débarquements de matériels et d'hommes en Grèce, qui vient d'entrer en guerre contre l'Axe. En réalité, la Royal Navy dispose du porte-avions HMS Formidable, de 3 navires de ligne et de 9 destroyers.

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Des Fairey Swordfish survolant le HMS Ark Royal

Ultra déchiffre des messages annonçant l’appareillage le 26 mars 1941 de la flotte italienne, composée du cuirassé, de 6 croiseurs lourds, de 2 croiseurs légers et de destroyers, une information confirmée par son survol par un hydravion anglais à 150 km au sud-est de la Sicile. La bataille a lieu les 27 et 29 mars 1941 au large du Ténare (ou cap Matapan) (Grèce).  Le Formidable lance 6 bombardiers-torpilleurs Fairey Albacore  dont l’un touche l’hélice bâbord du Vittorio Veneto. Plus tard, 6 Albacore et 2 Fairey Swordfish sont catapultés et touchent le croiseur Pola. La flotte italienne est repérée de nuit grâce aux radars des destroyers britanniques, lesquels coulent le Pola, le Zara  et le Fiume  ainsi que 2 destroyers. Le 26 mai 1941, de retour de Crète et convoyant des avions vers Malte, le Formidable est attaqué par 12 bombardiers-torpilleurs allemands et endommagé par 2 bombes d’une tonne. Il rejoint les États-Unis pour réparations. La Mediterranean Fleet est désormais composée du HMS Ark Royal qui remplit de nombreuses missions en mai 1941 dont les convoyages de Supermarine Spitfire et de Hawker Hurricane à Malte. Le 22 mai 1941, le porte-avions se trouve dans l’océan Atlantique à la recherche du Bismarck.

La fin du Bismarck (1941)

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Un Swordfish à l’appontage sur l’HMS Ark Royal après le torpillage du cuirassé Bismarck (26 mai 1941)

Le 21 mai 1941, le cuirassé Bismarck et le croiseur lourd Prinz Eugen quittent Bergen (Norvège) en direction du nord-est de l’Islande pour commencer à attaquer les convois traversant l’Atlantique. Le 22 mai, le croiseur de bataille HMS Hood et le cuirassé HMS Prince of Wales quittent Scapa Flow pour intercepter les deux bâtiments allemands. Le 23 mai, dans le détroit de Danemark, des destroyers britanniques attaquent le Bismarck mais leurs tirs n'entament pas le blindage du cuirassé qui riposte en coulant le Hood avec 1 400 marins. Avarié, le HMS Prince of Wales rompt le combat après avoir réussi à toucher deux soutes à combustible du cuirassé allemand, qui doit rejoindre Brest pour réparation après s'être séparé du Prinz Eugen. Le 24 mai, le porte-avions HMS Victorious lance 9 Swordfish et 2 Fairey Fulmar contre le Bismarck, mais une seule torpille touche le Bismarck, sans vraiment d’effets. Le 26 mai, un avion de patrouille maritime PBY Catalina repère le Bismarck. Quatorze avions torpilleurs Fairey Swordfish s'envolent du porte-avions HMS Ark Royal et dans le brouillard, attaquent par méprise le croiseur léger HMS Sheffield, heureusement sans l'atteindre. Après être retournés sur le porte-avions, les avions sont réarmés en une heure et repartent à l’attaque, localisant cette fois-ci le Bismark qui est touché par 2 torpilles qui endommagent son appareil à gouverner. Tandis qu'il tourne en rond, les cuirassés King Georges V et Rodney le pilonnent au canon, le croiseur lourd HMS Dorsetshire dont un obus de 203 mm avait détruit dès le début du combat son système radar, le condamnant à tirer en optique, l'achève en le torpillant, le 27 mai avec environ 1 900 marins à bord. Le croiseur lourd Prinz Eugen parviendra à rejoindre Brest. Ni la Luftwaffe ni les U-boot n'ont tenté de sauver le Bismark.

Des CAM ships aux porte-avions d'escorte

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Un Hawker Hurricane lancé d'un CAM ship

La plus grande menace pour les forces alliées en océan Atlantique est constituée par les U-Boote allemands. Les hydravions Short Sunderland et les avions de patrouille maritime PB4Y Privateer sont utilisés dans des missions de lutte anti-sous-marine mais le rayon d’action limité de ces appareils laisse une zone non couverte au milieu de l’Atlantique. Pour résoudre le problème, la Royal Navy monte des Supermarine Spitfire lancés par catapulte sur 50 navires marchands transformés en CAM ships (Catapult Armed Merchants). Bien que la solution soit transitoire, un Supermarine Spitfire lancé le 3 août 1941 abat un Condor. Le développement de la bataille de l’Atlantique voit le développement de porte-avions d'escorte (CVE) legerset peu rapides, destines à assurer une couverture aérienne aux convois. Le premier d’entre-eux, le HMS Audacity, transformé à partir d’un navire marchand allemand capturé, le MV Hannover, sert de modèle aux porte-avions d'escorte américains, comme l’USS Long Island, lancé le 11 janvier 1940.

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Le HMS Audacity, le 1er porte-avions d'escorte

Opérationnel quant à lui en juin 1941, l’Audacity abat à proximité de Gibraltar un Condor de patrouille maritime allemand grâce à un Supermarine Spitfire. Plusieurs classes représentant environ 130 bâtiments sont construites aux États-Unis et mises en œuvre en vertu de la loi prêt-bail (Lend-Lease) de février 1941 par le Royaume-Uni : la classe Long Island (1 armé par l’US Navy, l'USS Long Island; 1 par la Royal Navy, le HMS Archer), la classe Charger (1 par l’USN, l’USS Charger ; 3 par la RN sous le nom d’Avenger), la classe Sangamon (4 par l’USN), la classe Bogue (11 par l’USN, 34 par la RN sous les noms d’ Attacker et d’Ameer), la classe Casablanca (50 par l’USN) et la classe Commencement Bay (19 par l’USN). En avril 1943, la menace des U-Boote atteint un pic. Ce mois-là, les convois alliés perdent un tonnage de 567 000 tonnes contre seulement 6 sous-marins allemands coulés. Les avions des porte-avions d'escorte USS Bogue, HMS Archer, HMS Biter et HMS Dasher (constitués en hunter-killer groups) commencent à éloigner les U-Boote. Le 23 avril, le Biter aidé d'un destroyer est le premier porte-avions à couler un U-Boot. Bientôt, les attaques de l’Archer et du Bogue sont couronnées de succès. Le 4 octobre, les avions de l'USS Card coulent 3 sous-marins d'un coup. Le bâtiment terminera la guerre avec 8 victoires à son actif contre 10 pour le Bogue. Le 4 mai 1944, l'USS Guadalcanal arraisonne et capture le U 505 au large de l'Afrique-Occidentale française. En plus d'être le 1er bâtiment capturé par l'US Navy depuis 1815, il sera d'une grande utilité pour les services de contre-espionnage américains.

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Le U 505 peu de temps après sa capture par l'USS Guadalcanal (4 mai 1944)

Le décryptage des codes allemands et l'aide des bombardiers à long rayon d'action B-24 Liberator permet d'avril à septembre 1943 aux porte-avions d'escorte d'envoyer par le fond 33 U-Boote (et d'aider à en couler 12 autres) dans l'Atlantique et 14 dans l'Arctique. Sur les 151 porte-avions américains en service durant la Seconde Guerre mondiale, 122 sont des porte-avions d'escorte. Dans le même temps, le Japon en construit 14.

L'attaque de Pearl Harbor et les succès japonais (1941-1942)

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Attaque de l’USS Langley à proximité de Java (Indes orientales néerlandaises) (27 février 1942)

Encouragé par le succès britannique à Tarente et dans le cadre de l’expansion impériale, l’amiral Isoroku Yamamoto lance une task-force (Kidô Butai) comprenant 6 de ses meilleurs porte-avions : le Kaga, l’Akagi, le Soryu, le Hiryu, le Shokaku et le Zuikaku contre la Flotte du Pacifique américaine à Pearl Harbor. Avant l’aube du 7 décembre 1941, plus de 350 chasseurs Mitsubishi A6M Zero, bombardiers-torpilleurs Nakajima B5N Kate et bombardiers en piqué Aichi D3A décollent des porte-avions japonais. Leur attaque commence à 7 heures 30 du matin. La 1re vague touche les bases aériennes autour de l’île d’Oahu afin de détruire la défense antiaérienne américaine. Les avions continuent sur Pearl Harbor pour attaquer les navires de ligne au mouillage. En deux heures, 8 cuirassés, 3 croiseurs, 3 destroyers, 4 autres navires et 250 avions sont coulés ou endommagés.

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Un bombardier-torpilleur Nakajima B5N Kate est catapulté du Shokaku en direction de Pearl Harbor (7 décembre 1941)

Les pertes américaines comprennent 2 400 morts et 1 200 blessés. La surprise de l’attaque japonaise est si complète que seulement 29 avions japonais sont perdus. Par chance, les porte-avions américains ne sont pas au port : l’USS Saratoga est sur la côte ouest pour réparations, et l’USS Enterprise et l’USS Lexington convoient des avions jusqu’aux îles Midway. Après son succès à Pearl Harbor, la Kidô Butai poursuit ses opérations dans le Pacifique, qui la mènent à la prise de Wake, de Guam, des îles Gilbert, de Hong Kong et des Philippines. La Royal Navy, redoutant à son tour une attaque sur ses positions sud-asiatiques, fait appareiller la Force Z en direction de Bornéo pour empêcher un éventuel débarquement japonais en Malaisie. Le 10 décembre 1941, au large des îles Anambas, le cuirassé HMS Prince of Wales et le croiseur de bataille HMS Repulse sont repérés par le sous-marin I-65 puis par 3 hydravions. L'aviation japonaise fait décoller 88 avions (dont 61 bombardiers Mitsubishi G3M et 17 bombardiers-torpilleurs Mitsubishi G4M), qui torpillent et coulent les deux bâtiments le long des côtes de Kuantan (Mer de Chine méridionale) faute d'avoir reçu un soutien aérien. Après avoir conquis Singapour, les Japonais se dirigent vers le sud pour prendre possession des champs pétroliers des Indes orientales néerlandaises, battant la flotte de l’ABDA en février et mars 1942 aux alentours de Java, détruisant notamment l’USS Langley le 27 février. Peu avant, le 18 février 1942, 188 avions japonais des porte-avions Kaga, Akagi, Soryu, et Hiryu ou bases à terre attaquent Darwin (Australie), coulant 8 navires et détruisant 18 avions.

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L’aviation embarquée du Shokaku avant la 2e vague de l’attaque de Pearl Harbor. À l’avant-plan, un chasseur Mitsubishi A6M Zero (7 décembre 1941)

Le Japon s’intéresse ensuite à Ceylan et aux côtes de l’Inde, passage stratégique du pétrole du golfe Persique destiné à la Royal Navy. Cette dernière met sur pied une task force comprenant le cuirassé HMS Warspite, 4 navires de la Première Guerre mondiale et les porte-avions HMS Indomitable, Formidable et HMS Hermes. La Marine impériale japonaise envoie une contre-force de 5 porte-avions et de 4 cuirassés pour attaquer les Britanniques à Colombo (Ceylan) : le 5 avril 1942, 315 avions embarqués japonais attaquent la base, mais les navires de la Royal Navy se sont déjà retirés à son  Port T  sur l’atoll Addu (Maldives), à 480 km au sud. La flotte anglaise monte cependant une contre-offensive mais est défaite par les porte-avions japonais : 80 bombardiers-torpilleurs Mitsubishi G4M attaquent et coulent les croiseurs HMS Cornwall  et HMS Dorsetshire. L’Hermes est également repéré et coulé à proximité de Ceylan le 9 avril. Le Japon contrôle désormais la totalité du Pacifique de l'ouest d’Hawaii à Ceylan.


29/12/2014
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LES TRAITÉS MARINES

Traité de Washington de 1922

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Warren Gamaliel Harding, né le 2 novembre 1865 et mort le 2 août 1923, est le vingt-neuvième président des États-Unis. Élu en novembre 1920 pour un mandat de quatre ans à partir de mars 1921, il meurt avant de pouvoir le terminer en 1923.

Élu sur un programme conservateur, il freine les réformes progressistes de ses prédécesseurs. Son mandat sera surtout marqué par une série de scandales qui impliqueront son gouvernement et ses amis.

Le traité naval de Washington limita les armements maritimes de ses cinq signataires : les États-Unis, le Royaume-Uni, le Japon la France et l'Italie. Il s'insère dans les Accords de Washington, beaucoup plus larges.

Le traité fut développé à la conférence navale de Washington qui se tint à Washington, D.C. de novembre 1921 à février 1922 sous la présidence de Warren Gamaliel Harding et fut signé par les représentants des pays membres le 6 février.

Les termes du traité furent modifiés par le traité naval de Londres de 1930 et le Second Traité naval de Londres de 1936. Lors de ce dernier, le Japon avait publiquement déclaré ne plus compter obéir aux limitations imposées par le précédent, et l'Italie l'ignorait secrètement. L'Allemagne ne fut jamais concernée par les traités de Washington et de Londres, ses constructions navales étaient contrôlées par le traité de Versailles.

De ce fait, plusieurs vieux bâtiments ont été mis hors service ou ont subi des modifications majeures.

Le traité naval de Washington s'inscrit dans le contexte de la promotion d'une réduction des armements qui était l'une des premières raisons d'être de la S.D.N naissante. Au lendemain de la Première Guerre mondiale l'Empire britannique avait la marine la plus grande et la plus puissante du monde, suivie de près par les États-Unis, puis, de plus loin, par l’Empire du Japon. Tous les trois se lancèrent dans de vastes programmes de construction de nouveaux navires principaux (cuirassés et croiseurs de bataille). En 1920, les États-Unis avaient déclaré l'objectif de construire une marine « qui ne soit dépassée par personne  et avaient déjà mis sur cale cinq cuirassés et quatre croiseurs de bataille. Le Japon démarrait un projet de flotte huit-huit (huit cuirassés et autant de croiseurs). Au début de 1921 les Britanniques commandèrent quatre très grands croiseurs de bataille d'un type nouveau et prévoyaient quatre cuirassés correspondants. Cette éclosion de nouveaux navires majeurs alimenta la peur d'une nouvelle course à l'armement naval, similaire à la compétition desDreadnought entre l'Allemagne et la Grande-Bretagne qui mena, en partie, à la Première Guerre mondiale.

À cette époque, la puissance économique des États-Unis était considérablement supérieure à celle de leurs rivaux potentiels. Son produit intérieur brut valait environ trois fois celui de la Grande-Bretagne et six fois celui du Japon. Même si les États-Unis avaient la faculté économique de dépasser les autres puissances navales en termes de construction, la montée de l'isolationnisme impliquait que le soutien politique interne pour quelque chose d'aussi ambitieux manquait. Les empires japonais et britannique étaient liés par l'Alliance anglo-japonaise qui incluait une défense mutuelle. La perspective d'un traité de limitation navale offrit au gouvernement américain une chance de satisfaire le sentiment isolationniste dans son pays tout en offrant aux gouvernements japonais et britannique un équilibre des forces (face aux États-Unis) plus favorable que celui qu'ils auraient pu obtenir par leurs chantiers navals. Tenues par leur engagement à un traité multipartite sur lequel elle ne possédait pas de réelle force de pression à titre propre, les marines italienne et française par contre ont pu se voir pénalisées d'être soumises à des limitations arbitraires de parité qui se révèleront pour elles contraignantes et difficiles à observer.

L'influence de l'analyse cryptographique sur le traité

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Après avoir stipulé quelques exceptions pour les navires déjà en service et ceux en construction, le traité limitait le tonnage total de grands navires de bataille pour chacun des signataires aux valeurs indiquées à droite. Pour l'Empire britannique, il s'agissait de la somme de ses flottes : celle du Royaume-Uni et les flottes australienne, canadienne, indienne et néo-zélandaise. De plus, aucun navire ne devait dépasser un déplacement de 35 000 tonnes (anglaises de 1 016kg), ou porter un canon d'un calibre dépassant 16 pouces (406 mm).

Le tonnage fut défini dans le traité comme excluant le carburant (et l'eau des chaudières), le Royaume-Uni argumentant que la nature globale de ses activités exigeait plus de carburant dans les soutes de ses navires et qu'elle ne devait pas en être pénalisée.

Les porte-avions furent traités à part par le traité. En plus d'une limitation en tonnage global, des règles fixant la taille maximum de ces navires furent fixées. Chaque pays n'avait droit qu'à deux porte-avions de plus de 27 000 tonnes, lesquels ne devaient pas dépasser 33 000 tonnes chacun - cette exception était en fait pensée pour permettre de convertir certains croiseurs de bataille en cours de construction en porte-avions, elle donnera naissance à certains des plus célèbres porte-avions de l'Histoire, les classes Lexington, Akagi et Courageous. Le calibre maximum des canons portés par les porte-avions était limité à celui applicable aux croiseurs, pour qu'un cuirassé ne puisse être doté de quelques aéronefs et désigné comme porte-avions.

En ce qui concernait les croiseurs, leur tonnage ne devait pas dépasser 10 000 tonnes et leur artillerie principale le calibre de 8 pouces (203 mm).

Toutes les marines se mirent à construire des croiseurs dits « Washington » en fonction de ces limites. La France mit ainsi sur cale en 1925 le Duquesne et le Tourville. Ils seront suivis de cinq autres croiseurs « de 1re classe », les quatre de la classe Suffren : Suffren, Dupleix, Colbert, Foch et l'Algérie. Le Royaume-Uni en réalisera 13 de la classe County, dont deux pour le compte de l’Australie, qui s'ajouteront à trois croiseurs de la classe Hawkins, armés de sept canons de 7,5 pouces (190,5 mm), antérieurs au traité de Washington, et auxquels s'ajouteront deux croiseurs armés seulement de six pièces de 203 mm, les HMS Exeter et York. Les États-Unis construiront 18 croiseurs lourds, les deux premiers portant dix canons de 203 mm (deux tourelles triples superposées à deux tourelles doubles), l’autre portant trois tourelles triples de 203 mm. Le Japon en construira 12, quatre armés de six canons de 200 mm, et huit armés de dix canons de 203 mm, et l’Italie 7 (Trieste, Trento, Zara, Fiume, Pola, Gorizia et Bolzano).

Les premiers bâtiments construits étaient pratiquement dépourvus de blindage, à tel point qu’ils se virent qualifiés de « tinclad ships, c’est-à-dire navire de guerre en fer blanc. Les derniers, comme les sept de la classe New Orleans et l'USS Wichita, ou l'Algérie se virent dotés d’une protection convenable, c'est-à-dire une ceinture blindée de 125 mm d'épaiseur.

Toutefois, le coût élevé de ces unités devait rapidement amener, dans le même temps, la réalisation de croiseurs plus modestes. Dans ce domaine, la France avait montré l’exemple, en mettant en chantier dès 1922 trois croiseurs dits de 8 000 tonnes (en fait, 7 300) de la classe Duguay-Trouin. Sous les noms de Dugay-Trouin, Lamotte-Piquet et Primauguet, ils étaient armés de huit pièces de 155 mm en quatre tourelles doubles. Après le York et l’Exeter de 8 300 tonnes, l’Angleterre entreprend, à partir de 1929, la construction de huit unités de 7 000 tonnes (classe Leander), armés de huit pièces de 6 pouces (152 mm). L’Italie mettra sur cale en 1928 les quatre premiers Incrociatori legeri de la série des douze condottieri. Ceux-ci déplaçaient 5 200 tonnes et étaient armés de huit pièces de 152 mm. Quant à l'Allemagne qui n'était pas partie au Traité de Washington, mais était soumise aux stipulations du traité de Versailles qui limitait le déplacement de ses croiseurs à 6 000 tonnes, elle construit des croiseurs légers armés de neuf pièces de 150 mm.

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Le Lexington

Devant cette situation, les signataires du traité de Washington estimèrent nécessaire d’apporter à ce traité un complément plus spécifiquement adapté au problème des croiseurs. Signé le 22 avril 1930, le Traité de Londres définira deux types :

Le type (A), avec des limites de déplacement et de calibre de l’artillerie principale qui étaient celles définies en 1922 à Washington, à savoir 10 000 tonnes et 203 mm. La construction de ces croiseurs était interdite pour l'avenir.

Le type (B) dont l’artillerie ne devait pas dépasser le calibre de 155 mm. Cette valeur avait été choisie en fonction des croiseurs français de la classe Duguay-Trouin, afin que ceux-ci puissent entrer dans cette catégorie.

Le traité de Londres comportait de surcroît un mécanisme complexe de limitation du déplacement total des croiseurs par pays, et des conditions de remplacement que la France refusa, très préoccupée par la construction en Allemagne de la classe Deutschland, et l'Italie refusa également ces stipulations. Aucune limite de déplacement, ni du nombre de pièces d'artillerie n’était toutefois fixée pour les croiseurs dits légers. Aussitôt, dans son Premier Plan de réarmement naval de 1930, la Marine Impériale japonaise a lancé la construction de la classe Mogami, portant quinze canons de 155 mm en cinq tourelles triples, sans concession sur le blindage, ni la vitesse, et affichant un déplacement sous-évalué de 8 500 tonnes. Les États-Unis ont riposté immédiatement avec la classe Brooklyn, qui porte aussi cinq tourelles triples de 152 mm. Le Royaume-Uni se voit contraint d'abandonner ses projets de croiseurs des classes Leander et Arethusa portant respectivement huit canons et six canons de 152 mm et lance la construction de la classe Town portant douze pièces de 152 mm, en quatre tourelles triples, avec un déplacement de plus de 11 000 tonnes. En 1939-1940, le Japon, qui a annoncé en 1934, qu'il ne se soumettra plus à aucune stipulation d'un traité de désarmement naval, installera, sur la classe Mogami, des tourelles doubles de 203 mm à la place des tourelles triples de 155 mm.

S'agissant des fortifications et des bases navales, les États-Unis, l'Empire britannique et le Japon convinrent de maintenir le statu quo existant au moment de la signature. Aucune nouvelle fortification ou nouvelle base ne pouvait être établie, et les bases et défenses existantes ne pouvaient plus être améliorée dans les territoires et possessions listées. En règle générale, les aires spécifiées autorisaient la construction sur les côtes principales des pays, mais pas sur de petites îles. Par exemple, les États-Unis pouvaient construire à Hawaii et en Alaska mais pas aux îles Aléoutiennes. De même l'Empire britannique, considéré par le traité comme une seule entité, pouvait améliorer les bases en Grande-Bretagne, Australie, etc., mais pas celle de Hong Kong. Le Japon pouvait construire sur son propre archipel, mais pas à Taïwan.

Les signataires du traité étaient autorisés à remplacer ou construire des navires dans la limite des termes de celui-ci, mais toute construction ou remplacement devait être directement communiqué aux quatre autres signataires pays.

Le 29 décembre 1934, le gouvernement japonais signala qu'il comptait mettre fin au traité. Ses dispositions restèrent en vigueur jusque fin 1936, et il ne fut pas renouvelé.

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Le Courageaous, le furious britanniques

En Europe, le traité changea les programmes de construction de la plupart des signataires. Les Britanniques abandonnèrent les cuirassés N3 et croiseurs de bataille G3. Presque toutes les puissances construisirent de nouveaux modèles dans la nouvelle catégorie des croiseurs lourds, mais dans le même temps peu de nouveaux cuirassés virent le jour. À la place, d'importantes modifications furent effectuées sur les cuirassés et croiseurs de bataille existant, si bien que certaines flottes de la Seconde Guerre mondiale consistèrent principalement en des navires mis sur cale avant la fin de la Première Guerre mondiale. Les États-Unis ne construisirent aucun nouveau cuirassé avant la mise sur cale du North Carolina en 1937, après un arrêt de presque 20 ans.

Nombre de tentatives furent effectuées pour construire de nouveaux cuirassés dans les limites du traité. La nécessité d'améliorer la puissance de feu et le blindage tout en limitant le tonnage résulta dans des conceptions innovantes comme celle de la classe Nelson britannique (basée en partie sur le G3) et des deux Richelieu français.

De façon générale l'efficacité des navires dérive de la vitesse, le blindage et la puissance de feu. Le tonnage est lié à la longueur du navire qui permet de le rendre plus rapide. Chaque pays procéda différemment pour contourner le traité. Les États-Unis utilisèrent des chaudières à haute résistance pour rendre plus rapide des petits navires. L'Allemagne utilisa de meilleurs aciers pour améliorer la défense tout en réduisant le tonnage. La Grande-Bretagne construisit des navires prévus pour que du blindage puisse être ajouté après le début d'une guerre éventuelle, et dans le cas du Nelson et du Rodney, des espaces entre coques pouvaient être remplis d'eau pour fournir une défense supplémentaire. L'Italie a tout simplement menti sur le tonnage de ses navires. Le Japon se retira du traité en 1936, permettant de continuer les projets qui avaient déjà été lancés, ce qui comprenait l'armement du Yamato par de monstrueux canons de 650 mm.

La plupart des pays européens ne s'intéressaient pas aux opérations militaires loin de leur territoire, et donc à la construction de porte-avions. Les Allemands et les Italiens ne se soucièrent pas de construire des porte-avions, la France se contentant de transformer un seul cuirassé en porte-avions, le Béarn, avant que la 2e Guerre mondiale s'annonce, et à ce moment ils commencèrent à en construire un petit nombre. Mais la Royal Navy, qui était chargée des opérations à travers le monde, avait un besoin évident de porte-avions et en continua donc la construction. De 1920 à 1939, la Grande-Bretagne lança six nouveaux porte-avions, chacun en modèle unique après une longue pause entre 1922 et 1935. Les États-Unis en avaient six au début de la guerre, sans compter l'antique CV-1 Langley, qui avait été converti en porte-hydravions pour permettre la construction du nouveau CV-7 Wasp. Après la fin du traité, ils lancèrent six nouveaux porte-avions, les premiers étant le Hornet (une copie du Yorktown), et l'Essex, premier d'une classe qui allait devenir légendaire. Le Japon convertit des navires inachevés (le cuirassé Kaga et le croiseur de bataille Akagi) en porte-avions pour se plier au traité. Les concessions fournirent une expérience grandement nécessaire et aidèrent à construire les futures classes de porte-avions. Le Japon en avait dix au début de la guerre.

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William (Billy) Mitchell (né le 28 décembre 1879, mort le 19 février 1936) était un général américain, pilote et pionnier de l'aviation militaire. Sa carrière dans l'armée fut parsemée de controverses et de problèmes avec sa hiérarchie. Il fut condamné par une cour martiale pour insubordination en 1925.

Les Français étaient mécontents du traité. Ils déclarèrent qu'ils devaient avoir droit à une flotte plus grande que celle de l'Italie, puisque la France se devait de maintenir une flotte à la fois dans l'Atlantique et la Méditerranée, tandis que les Italiens n'avaient à être présents que dans la seconde - ce qui clairement leur permettait d'avoir une présence en Méditerranée surpassant celle de la France. Néanmoins, ils signèrent le traité, partiellement rassurés par leur alliance avec les Britanniques.

L'effet du traité pour les États-Unis fut opposé. Le traité, combiné avec l'attaque de Pearl Harbor qui détruisit plusieurs des cuirassés américains, fut une raison majeure de la conversion de l'US Navy d'une flotte reposant sur les cuirassés vers une flotte reposant sur les porte-avions.

Les États-Unis dépassaient la limite de tonnage de navires principaux (cuirassés et croiseurs de bataille) quand le traité fut ratifié et durent démanteler ou désarmer plusieurs vieux bâtiments pour s'y plier. En revanche, le seul porte-avions dont disposait la flotte américaine quand le traité fut signé était le CV-1 Langley (11 700 tonnes), un vraquier converti. Non seulement les porte-avions avaient une limite de tonnage à part, mais le Langley, en tant que vaisseau expérimental, ne comptait pas pour la valeur de tonnage. L'US Navy avait ainsi le champ libre pour construire des porte-avions.

Dans les années 1920 le département de la Marine avait une opinion négative sur le concept d'aéronavale malgré (ou peut-être du fait de) la démonstration de force de Billy Mitchell en 1921, qui utilisa des bombardiers de l'armée pour couler le cuirassé allemand capturé Ostfriesland. Cependant, pour satisfaire au traité, deux croiseurs de bataille de la classe Lexington (44 200 tonnes) encore en cours de construction, le Lexington et le Saratoga, devaient être utilisés autrement. Ils furent convertis en porte-avions (avec un tonnage réduit à 33 000 tonnes, même si ce choix ne fut préféré que de justesse à la ferraille. Cependant ils possédaient aussi des canons de 8 pouces, le calibre maximal autorisé par le traité pour des porte-avions de plus de 27 000 tonnes. Les porte-avions furent l'objet de quantité de méthodes de calcul inventives de leur tonnage, et étaient en réalité beaucoup plus près de 40 000 tonnes lors de leur mise en service.

En 1931, les États-Unis étaient encore bien en dessous de la limite du traité sur les porte-avions. Le Ranger fut le premier porte-avions américain conçu comme tel, aucun autre type de navires principaux ne pouvant être construit, et la Marine commença à intégrer les leçons des quatre premiers porte-avions dans la conception de deux nouveaux. En 1933, le Congrès vota le New Deal de F.D. Roosevelt, qui comprenait un budget de près de 40 M$ pour deux nouveaux porte-avions, qui seront le Yorktown (20 000 tonnes avec les méthodes de calcul appliquées, mais plutôt 25 000 en réalité) et l’Enterprise (identique). Toujours sous la limite des 135 000 tonnes, la coque du dernier porte-avions américain d'avant guerre construit dans le cadre du traité, le Wasp (15 000 tonnes, en réalité plutôt 20 000), fut posée en 1936. La flotte américaine de porte-avions atteignait maintenant les 135 000 tonnes et ne changea plus jusqu'à ce que le Japon dénonce le traité en 1936.

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Le traité naval eut un profond effet sur les Japonais, dont beaucoup virent le rapport 5:5:3 comme une autre façon d'être mis en infériorité par rapport à l'Occident. Il contribua aussi à un schisme dans l’état-major de la marine impériale japonaise; d'un côté se trouvait la faction d'officiers soutenant le traité, de l'autre les opposants qui trouvaient leurs alliés dans les éléments ultra-nationalistes de l'armée et d'autres corps du gouvernement. Pour les opposants au traité, celui-ci fut l'un des facteurs qui contribuèrent à la dégradation des rapports entre les États-Unis et l'Empire du Japon. Son injustice, du moins aux yeux des Japonais, est aussi ce qui mena à la dénonciation de ses limites par le Japon en 1936. Isoroku Yamamoto, qui fut plus tard l'architecte de l'attaque de Pearl Harbor, soutint que le Japon devrait rester dans le Traité et fut regardé comme membre de la faction pro-occidentale. Son opinion était plus complexe, en réalité, et il comprenait que sans le traité les États-Unis pourraient surclasser le Japon par un rapport bien plus grand que 5 contre 3 en utilisant leur énorme capacité de production, qu'il connaissait pour avoir servi à l'ambassade du Japon à Washington. Il comprenait aussi que des autres moyens devraient être employés pour rééquilibrer les chances, ce qui pourrait l'avoir mené à défendre le plan d'attaque de Pearl Harbor. Cependant, il n'avait pas assez d'influence sur la marine ni sur le gouvernement, et le Japon quitta le traité en 1936.

Traité naval de Londres

Le traité naval de Londres est un traité signé le 22 avril 1930 entre le Royaume-Uni, l'Empire du Japon, la France, l'Italie et les États-Unis limitant les navires de guerre de chaque marine. Il fait suite au traité naval de Washington de 1922.

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Article du Osaka Asahi Shimbun paru le 15 mai 1932 et faisant état de l'assassinat du Premier ministre Tsuyoshi Inukai et de la tentative de coup d'État menée en raison de la ratification du traité par l'Empire du Japon.

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Inukai Tsuyoshi, né le 4 juin 1855 et assassiné le 15 mai 1932) est un homme politique japonais, dix-huitième premier ministre du Japon du 13 décembre 1931 au 15 mai 1932.

Inukai Tsuyoshi commence par travailler comme journaliste avant de se tourner vers la politique. Il fut nommé ministre de l'éducation en 1898. En 1929, il devient président du Rikken Seiyūkai et élu premier ministre en 1931.

les termes

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Le traité naval de Londres est une extension du traité naval de Washington et est officiellement appelé le Traité pour la restriction et la réduction d'armement naval. C'était une reprise de la Conférence navale de Genève de 1927 qui avait été incapable de parvenir à un accord. Il est issu des discussions tenues entre le président Herbert Hoover et le premier ministre Ramsay MacDonald en 1929.

Les signataires du traité s'engageaient de ne pas construire de nouveaux bâtiments de guerre majeurs jusqu'en 1937. Un certain nombre de bâtiments de guerre vieillissants ont été abandonnés. Aucun vaisseau existant ne devait être converti en porte-avions. Le tonnage total des croiseurs, destroyers et sous-marins à être construits d'ici 1937 a été limité. L'article 22 se rapportant à la guerre sous-marine déclare que le droit international s'applique à eux comme aux vaisseaux de surface. Les vaisseaux marchands qui n'ont pas manifesté le refus persistant de s'arrêter ou la résistance active ne pouvaient pas être coulés sans que l'équipage du navire et les passagers aient d'abord été déposés à un endroit sécurisé.

La phase suivante de contrôle des armements naval était la Deuxième Conférence navale de Genève en 1932 qui est suivie de la deuxième conférence de désarmement naval de Londres de 1936.

Application

La Royal Navy, l'US Navy et la marine impériale japonaise ont cherché à s'entendre sur le traité. Par exemple, les croiseurs légers construits par ces nations au cours des années suivantes, n'avaient de léger que le nom. Puisque le traité de Londres définit la taille du calibre maximum des croiseurs légers à 155 mm, les signataires ont multiplié leur nombre et en ont augmenté le blindage.

 Second Traité naval de Londres

La Deuxième Conférence de Désarmement Naval de Londres a été organisée à Londres entre le 9 décembre 1935 et le 24 mars 1936. Elle est suivie du Deuxième Traité naval de Londres qui a été signé le 25 mars 1936.

Les signataires étaient la France, le Royaume-Uni et les États-Unis. Le gouvernement du Japon, qui avait été signataire du Premier Traité naval de Londres, s'était retiré de la conférence le 15 janvier. L'Italie est également sortie des négociations, à la suite de l'hostilité publique sur son invasion de l'Abyssinie.

Termes

La conférence était destinée à limiter la croissance des armements navals jusqu'à son expiration en 1942. Le traité a notamment limité le déplacement (taille) des navires et du calibre maximum des canons qu'ils pourraient emporter.

Les cuirassés ont été limités aux canons de 356 millimètres (14 pouces) et à un déplacement de 35 000 tonnes. Une clause a été incluse qui permettait d'installer des canons de 406 millimètres (16 pouces) si une autre partie du Traité naval de Washington ne respectait pas ses engagements. Les porte-avions ont été restreints à 23 000 tonnes, et le traité confirma l'interdiction de transformer les navires marchands en porte-avions. Les croiseurs légers ont été limités à 8 000 tonnes et à un calibre maximum de 155 millimètres (6,1 pouces). Les sous-marins ne pouvaient pas être plus lourds que 2 000 tonnes et ne pas avoir un canon de plus de 5,1 pouces. En outre, l'article 22 du premier Traité naval de Londres se rapportant à la guerre sous-marine déclarait que le droit international s'applique à eux comme aux vaisseaux de surface. Les vaisseaux marchands qui n'ont pas manifesté le refus persistant de s'arrêter ou la résistance active ne pouvaient pas être coulés sans que l'équipage du navire et les passagers aient d'abord été déposés à un endroit sécurisé. Le traité de 1936 a confirmé l'Article 22 du traité de 1930.

L'article 25 autorisait les signataires à sortir du traité si un autre pays construisait un bâtiment de guerre excédant des limites de traité. Pour cette raison, en 1938 les différentes parties du traité ont été d'accord sur une nouvelle limite de déplacement à 45 000 tonnes pour les cuirassés.

Application

Même pendant sa brève période d'application, ses clauses n'ont pas été respectées. Les croiseurs commandés par les États-Unis (classe St. Louis), par exemple, étaient de 5 000 tonnes plus lourds que le tonnage autorisé par le traité (en fait ils ont été commencés après la signature du traité, mais avant qu'il soit entré en application). Trois classes de cuirassés d'escadre ont été construites par les États-Unis : la classe North Carolina, la classe South Dakota et la classe Iowa. Les navires de ces classes ont été destinés à être armés avec des canons de 14 pouces, pourtant, avec l'invocation de la clause de non-respect du traité, ils ont été équipés par des canons de 16 pouces. Avec plus de 55 000 tonnes à pleine charge, la classe Iowa était la seconde plus lourde classe de cuirassé d'escadre jamais construit après la classe Yamato. Ce traité prit fin officiellement le 1er septembre 1939 avec le commencement de la Seconde Guerre mondiale.

Traité naval germano-britannique

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Le traité naval germano-britannique AGNA) était un traité bilatéral signé le 18 juin 1935 par le Royaume-Uni et le Troisième Reich.

Torpillant les dispositions du traité de Versailles et le front antihitlérien établi à Stresa, il est signé entre Ribbentrop et les Britanniques : la Grande-Bretagne, sans concerter ses Alliés, autorise le Troisième Reich à disposer d'une flotte de guerre allemande au tonnage limité de façon permanente à 35 % de celui de la marine britannique. Il a été résilié unilatéralement par Adolf Hitler le 28 avril 1939.

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L'accord retint le taux de 35 % pour la marine allemande par rapport à la marine anglaise. Ce taux devait demeurer constant quelle que soit l’évolution de l’armement naval pour chaque catégorie de navires. Pour les sous-marins, le taux fut cependant de 45 %. L’Allemagne ne pouvait faire des ajustements qu’avec l’accord du Royaume-Uni.

La Royal Navy avait un tonnage de 1 240 000 tonnes, à parité quasiment avec l'US Navy. Le traité de Versailles autorisait une flotte de guerre de 144 000 tonnes pour l'Allemagne qui avait désormais la possibilité 420 000 tonnes, soit près du triple.

Aussitôt, Hitler entreprenait un vaste programme de construction navale : 2 cuirassés, 2 croiseurs de bataille, 16 destroyers et 28 sous-marins.


29/12/2014
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CONTRE OFFENSIVE AMÉRICAINE EN 1942

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James Harold Doolittle dit Jimmy Doolittle (14 décembre 1896 - 27 septembre 1993) est un pilote américain, pionnier du développement de l'aviation de l'entre-deux-guerres. Officier de l'USAAF pendant la Seconde Guerre mondiale, il conçut et mena en avril 1942 un raid audacieux qui portera son nom, le raid de Doolittle le premier bombardement de Tokyo par les forces américaines.

Les groupes aérien embarqué des porte-avions américains de la Task Force F lancent des contre-attaques qui, bien que limitées, affaiblissent la Kidô Butai. Ainsi, le 1er février 1942, les avions de l’USS Enterprise attaquent Kwajalein (îles Marshall), coulant 3 navires japonais et en endommageant d’autres, tandis que le 21 février, un avion de l’USS Lexington attaque Rabaul (Nouvelle-Guinée) et abat 5 bombardiers-torpilleurs Nakajima B5N Kate. D’autres raids sur Wake et l’île Marcus, l’un des points extrêmes du Japon, apprennent aux Américains que les aviateurs japonais ne sont pas en contact radio avec leur porte-avions (d’où des attaques souvent désordonnées) et découvrent l’existence de pilotes kamikaze.

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Afin de redonner du moral aux troupes en brisant l’invulnérabilité de l’archipel nippon, le lieutenant-colonel des United States Army Air Forces (USAAF) James H. Doolittle décide d’un raid (le raid de Doolittle) sur le Japon. À l’occasion de son premier tour d’opération de guerre, le Hornet rejoint le 13 avril 1942, au nord d’Hawaii, la Task Force 16 (comprenant l’Enterprise) chargée de son escorte. Le 18 avril 1942 il lance 16 bombardiers B-25 Mitchell pour une attaque moins stratégique que symbolique, destinée à laver l’affront de Pearl Harbor et qui doit surtout avoir un effet psychologique. Après le bombardement de Darwin, l’expansionnisme du Japon Showa le pousse à isoler l’Australie en capturant Port Moresby en Nouvelle-Guinée et Tulagi sur les Iles Salomon. Cependant, les États-Unis ont décrypté le code JN-25 et la Flotte du Pacifique est préparée. Les porte-avions Lexington et Yorktown (Task-Force 17) appareillent avec 140 avions (42 Grumman F4F Wildcat, 74 Douglas SBD Dauntless, 25 TBD Devastator) pour la confrontation avec la Kidô Butai en mer de Corail. De son côté, la force d’invasion japonaise comprend les porte-avions Shokaku et Zuikaku basés à Port Moresby, plus le porte-avions léger Shoho à Tulagi comprenant 147 avions (54 Zero, 42 Aichi D3A, Kate).

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Les task-forces des belligérants s’affrontent le 7 mai 1942 et les Lexington et Yorktown lancent une attaque de 93 avions et coulent le Shoho de 13 bombes et 7 torpilles. Ayant eu vent du naufrage, les Japonais suspendent leur invasion de Port Moresby et envoient le Shokaku et le Zuikaku à la recherche des porte-avions, lançant 24 bombardier-torpilleur Nakajima B5N Kate, 36 bombardier en piqué Aichi D3A chasseur et 18 Mitsubishi A6M Zero. Par méprise, ils coulent le pétrolier USS Neosho, le destroyer USS Sims  et, plus tard dans la journée, lancent 27 avions qui, la nuit tombée tentent d’apponter sur les Lexington et Yorktown ! À l’aube du 8 mai, les task-forces se rencontrent. Le Zuikaku s’enfuit à la faveur du mauvais temps tandis que le Shokaku est touché par des bombardiers-torpilleurs Douglas SBD Dauntless qui endommagent fortement son pont d’envol. Les derniers avions américains décollent pour défendre leurs porte-avions, mais ils sont en trop petit nombre : seuls 17 Grumman F4F Wildcat sont en l'air. Le Yorktown évite 8 torpilles mais est touché par une bombe. Quant au Lexington, une bombe fait exploser ses conduites de fioul et le stock de carburant aéronautique, embrasant le porte-avion de l’intérieur. Plutôt que de le laisser tomber en mains ennemies, il est abandonné avec la plupart de son équipage de 3 000 hommes et coulé par ses destroyers d’escorte. La bataille de la mer de Corail se termine par un match nul avec un porte-avions coulé et un endommagé dans chaque camp. Il en sera tout autrement aux îles Midway, un mois plus tard.

Midway : la chance tourne (1942)

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À l’origine, l’amiral Yamamoto désire attaquer les îles Midway, au centre du Pacifique, avant Port Moresby et Tulagi, avec pour but la destruction des porte-avions américains. Finalement, ce n'est qu'en juin 1942 que Yamamoto monte une opération de diversion aux Îles Aléoutiennes afin d'attirer les porte-avions américains, où les attendraient les Kaga, Akagi, Soryu et Hiryu. Pendant ce temps-là, les îles Midway seraient envahies par 12 transports de troupes, 2 cuirassés, le porte-avions Zuiho et la propre task-force à 7 cuirassés de Yamamoto. Ayant décrypté le code JN-25, la TF 16 (USS Enterprise et USS Hornet sous le commandement de l’amiral Raymond Spruance) et la TF 17 (composée du désormais rafistolé USS Yorktown sous le commandement de l’amiral Frank J. Fletcher) se positionnent à 500 km au nord-est des îles Midway pour attendre la flotte japonaise.

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Frank Jack Fletcher, né le 29 avril 1885 à Marshalltown, Iowa, et mort le 25 avril 1973

Les groupes aériens totalisent 232 avions (111 SBD, 42 TBD Devastator, 79 Widcat) plus, sur l’atoll même, 119 avions de l’US Navy, des USAAF et des US Marine Corps, parmi lesquels les premiers bombardiers-torpilleurs TBF Avenger. Du côté japonais, on dispose de 297 avions (120 Zero, 84 D3A1, 93 Kate). L’affrontement débute le 4 juin 1942 par une pagaille au sein des groupes aériens de la TF 16, qui se trouvent séparés et incapables de localiser les navires japonais et de la TF 17 où tous les TBD de la flottille VT-8 sont abattus sans placer une seule torpille, ainsi que 10 TBD de la VT-6 et les 12 TBD de la VT-3, si bien que les SBD arrivent sans escorte aérienne ! Le vice-amiral Chuichi Nagumo, mal informé, ordonne à deux reprises de modifier l’armement des avions qui encombrent les ponts d’envol de ses porte-avions tandis que les Zero, à court de carburant, demandent à apponter. C’est alors que surgissent les SBD qui larguent 39 bombes.

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Le Soryu est touché à 3 reprises, le Kaga 4 fois et tous deux coulent dans les heures qui suivent, tandis que l’Akagi est sabordé le 5 juin à l’aube. Non repéré, l’Hiryu endommage sérieusement le Yorktown, qui est achevé par le sous-marin I-168. L’Hiryu est finalement touché de 4 bombes lancées par des SBD et doit être sabordé. Finalement, en une vingtaine d’heures, la Marine impériale japonaise perd 4 porte-avions, un croiseur, 253 avions et 3 057 hommes (dont de nombreux pilotes expérimentés), contre un porte-avions, un destroyer, 98 avions et 307 hommes du côté américain. Yamamoto, qui avait fait la prédiction que le Japon aurait le dessus pendant six mois à un an avant d'être débordé par l’US Navy, avait raison : six mois après l’attaque de Pearl Harbor, l'expansionnisme du Japon Showa est définitivement stoppé dans le Pacifique Sud. La bataille de Midway est une victoire décisive.

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La bataille de Guadalcanal

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En entamant la construction d’aérodromes sur Guadalcanal et Rabaul, la marine impériale japonaise a l’ambition de transformer la chaîne des îles Salomon, protectorat britannique en une base stratégique visant à perturber les communications maritimes entre les États-Unis et l’Australie. Les Alliés, connaissant les plans japonais, débutent le 7 août 1942 une offensive majeure en envoyant une force de débarquement amphibie de 80 navires à Guadalcanal (Operation Watchover). Les avions de l’USS Enterprise (TF 16), de l’USS Saratoga (TF 11) et de l’USS Wasp (TF 18) prennent position à proximité de l’île afin de procurer une couverture aérienne à plus de 16 000 marines. Ces derniers ont à subir des attaques aériennes journalières jusqu’au 20 août 1942, date à laquelle le porte-avions d’escorte USS Long Island livre deux escadrons de Widcat et de SBD à Henderson Field (Cactus Air Force), l’aérodrome situé au nord-est de Guadalcanal.

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La bataille des Salomon orientales débute le 23 août lorsqu'une task-force japonaise composée de destroyers, de transports de troupes, de 2 cuirassés et des porte-avions Shokaku, Zuikaku et Ryujo approche l’île. Le Wasp, l'Saratoga, l’Enterprise et le cuirassé North Carolina partent à la rencontre de la flotte ennemie. Le 24, les Japonais commencent à attaquer Henderson Field avec des avions de leur base de Rabaul et du Ryujo, qui est coulé de 10 bombes et une torpille. Le Shokaku et le Zuikaku attaquent de 3 bombes l’Enterprise, mais sans gravité, tandis que les avions du Saratoga endommagent gravement le transport d'hydravions Chitose. L’invasion, repoussée un temps, n’entraine pas moins les torpillages du Saratoga le 30 août (il regagne Pearl Harbor pour réparations) et du Wasp le 15 septembre (qui doit être abandonné), laissant le Hornet seul. La 2 vague d’invasion japonaise, dénommée bataille des îles Santa Cruz débute en octobre 1942. Les porte-avions Shokaku, Zuikaku, Zuiho et Junyo appareillent en direction des îles Santa Cruz, où ils sont attaqués le 26 octobre par des bombardiers-torpilleurs de l’Enterprise et du Hornet, qui sont à leur tour touchés, non sans mettre le Shokaku hors-service pour 9 mois. Le Hornet, attaqué à plusieurs reprises par plusieurs bombes et 2 torpilles, doit être abandonné (il sera coulé par des destroyers japonais), si bien que l’US Navy ne dispose une nouvelle fois que d’un seul porte-avions dans le Pacifique, bien que la Royal Navy met l'HMS Victorious à disposition.

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À proximité de Guadalcanal, un SBD survole l’USS Enterprise avec l’USS Saratoga en arrière-plan (19 décembre 1942)

Une dernière tentative d’invasion est repoussée par les avions de l’Enterprise et d’Henderson Field les 13-14 novembre. Début 1943, les Japonais commencent à évacuer 11 000 de leurs 30 000 soldats. Le 9 février, Guadalcanal est entièrement aux mains des Marines. Dès lors, la machine industrielle américaine se met en branle, permettant d'élargir la brèche ouverte dans le Pacifique avec la victoire de la bataille de Midway. La reconquête peut commencer.

Le débarquement en Afrique du Nord.

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En 1942, les forces américano-britanniques défendent toujours le ravitaillement de Malte tout en préparant un débarquement massif en Afrique du Nord occupée par les Allemands et les Italiens. Le 10 août 1942, 14 navires marchands pénètrent en Méditerranée, escortés par les porte-avions HMS Victorious, HMS Indomitable et HMS Eagle. Le HMS Furious suit, transportant 36 Supermarine Spitfire destines à la Royal Air Force à Malte (Operation Pedestal). Le lendemain, 4 torpilles lancées de l’U-73 touchent par surprise l’Eagle, qui coule en 10 minutes avec 200 marins. Le 12 août, les bombardiers allemands et italiens basés à terre attaquent le convoi : deux bombes touchent sans dommage le Victorious, tout comme le pont d’envol de l’Indomitable, tuant 50 marins. Avant d’atteindre Malte, le convoi est de nouveau attaqué mais 5 de ses 14 navires s’en sortent, dont le plus grand pétrolier d’alors, le SS Ohio.

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En coulant 9 cargos, 2 croiseurs, un porte-avions et un destroyer, l’attaque du convoi est un succès tactique pour l’Axe et est nommée par les Italiens Vittoria del mezz'agosto (la victoire de la mi-août). Néanmoins, une fois les sous-marins et les Bristol Beaufort et Bristol Beaufighter basés à Malte ravitaillés, ils sont capables de perturber l’approvisionnement de l’Afrika Korps de Rommel. Le 8 novembre 1942, les Alliés sont prêts à l’Opération Torch, c’est-à-dire l’invasion de l’Afrique du Nord. L’ensemble des troupes terrestres est placée sous la responsabilité du général Dwight Eisenhower tandis que les forces navales sont commandées par l’amiral Sir Andrew Cunningham avec pour adjoint l’amiral Sir Bertram Ramsay, concepteur de l’opération à partir des notes du colonel Germain Jousse, membre de l'organisation de résistance d'Alger.

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Les forces comprennent 107 000 hommes, 200 bâtiments de guerre (dont 12 porte-avions), 110 navires de transport et 500 avions. Elle se divise en 3 forces ayant pour mission d'établir 9 têtes de pont sur près de 1 500 km de côtes. Les forces ouest, sous le commandement du vice-amiral Henri Hewitt, comprennent l’USS Ranger et les porte-avions d'escorte USS Sangamon, USS Chenango, USS Suwanee et USS Santee chargés de capturer Casablanca à l’aide de Wildcat, de bombardiers Douglas SBD Dauntless et de bombardiers-torpilleurs Avenger.

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Germain Jousse 1885-1988

Les forces du centre, commandées par le contre-amiral Sir Thomas Troubridge, comprennent l’HMS Furious et les porte-avions d'escorte HMS Biter et HMS Dasher, qui couvrent les débarquements à Oran grâce aux bombardiers-torpilleurs Fairey Albacore et aux chasseurs Hawker Hurricane. Les forces est, commandées par le vice-amiral d'escadre Sir Harold Burrough, comprennent l’HMS Argus et le porte-avions d'escorte HMS Avenger, qui participent aux attaques sur Alger avec les chasseurs Seafire et Hawker Hurricane. Enfin, au large, les Victorious and Formidable empêchent les interventions de la Regia Marina. Les débarquements suscitent peu d’opposition et au mois de mai 1943, l’influence de l’Axe en Afrique du Nord a cessé.

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Escorté de 2 destroyers, le pétrolier SS Ohio entre dans le port de Malte (15 août 1942)

 

 

 

 


29/12/2014
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ATTAQUE DE PEARL HARBOR ET SUCCÈS JAPONAIS 1941-42

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L’amiral Isoroku Yamamoto (4 avril 1884 – 18 avril 1943) est une personnalité marquante de la Seconde Guerre mondiale en commandant les forces navales japonaises pendant la première partie de la campagne du Pacifique. Il a organisé et dirigé l'attaque surprise contre Pearl Harbor.

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 Attaque de l’USS Langley à proximité de Java (Indes orientales néerlandaises) (27 février 1942)

Encouragé par le succès britannique à Tarente et dans le cadre de l’expansion impériale, l’amiral Isoroku Yamamoto lance une task-force (Kidô Butai) comprenant 6 de ses meilleurs porte-avions : le Kaga, l’Akagi, le Soryu, le Hiryu, le Shokaku et le Zuikaku contre la Flotte du Pacifique américaine à Pearl Harbor. Avant l’aube du 7 décembre 1941, plus de 350 chasseurs Mitsubishi A6M Zero, bombardiers-torpilleurs Nakajima B5N Kate et bombardiers en piqué Aichi D3A décollent des porte-avions japonais. Leur attaque commence à 7 heures 30 du matin. La 1re vague touche les bases aériennes autour de l’île d’Oahu afin de détruire la défense antiaérienne américaine. Les avions continuent sur Pearl Harbor pour attaquer les navires de ligne au mouillage. En deux heures, 8 cuirassés, 3 croiseurs, 3 destroyers, 4 autres navires et 250 avions sont coulés ou endommagés. Les pertes américaines comprennent 2 400 morts et 1 200 blessés. La surprise de l’attaque japonaise est si complète que seulement 29 avions japonais sont perdus. Par chance, les porte-avions américains ne sont pas au port : l’USS Saratoga est sur la côte ouest pour réparations, et l’USS Enterprise et l’USS Lexington convoient des avions jusqu’aux îles Midway.

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 Un bombardier-torpilleur Nakajima B5N Kate est catapulté du Shokaku en direction de Pearl Harbor (7 décembre 1941)

Après son succès à Pearl Harbor, la Kidô Butai poursuit ses opérations dans le Pacifique, qui la mènent à la prise de Wake, de Guam, des îles Gilbert, de Hong Kong et des Philippines. La Royal Navy, redoutant à son tour une attaque sur ses positions sud-asiatiques, fait appareiller la Force Z en direction de Bornéo pour empêcher un éventuel débarquement japonais en Malaisie. Le 10 décembre 1941, au large des îles Anambas, le cuirassé HMS Prince of Wales et le croiseur de bataille HMS Repulse sont repérés par le sous-marin I-65 puis par 3 hydravions. L'aviation japonaise fait décoller 88 avions (dont 61 bombardiers Mitsubishi G3M et 17 bombardiers-torpilleurs Mitsubishi G4M), qui torpillent et coulent les deux bâtiments le long des côtes de Kuantan (Mer de Chine méridionale) faute d'avoir reçu un soutien aérien. Après avoir conquis Singapour, les Japonais se dirigent vers le sud pour prendre possession des champs pétroliers des Indes orientales néerlandaises, battant la flotte de l’ABDA en février et mars 1942 aux alentours de Java, détruisant notamment l’USS Langley le 27 février. Peu avant, le 18 février 1942, 188 avions japonais des porte-avions Kaga, Akagi, Soryu, et Hiryu ou bases à terre attaquent Darwin (Australie), coulant 8 navires et détruisant 18 avions.

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L’aviation embarquée du Shokaku avant la 2e vague de l’attaque de Pearl Harbor. À l’avant-plan, un chasseur Mitsubishi A6M Zero (7 décembre 1941)

Le Japon s’intéresse ensuite à Ceylan et aux côtes de l’Inde, passage stratégique du pétrole du golfe Persique destiné à la Royal Navy. Cette dernière met sur pied une task force comprenant le cuirassé HMS Warspite, 4 navires de la Première Guerre mondiale et les porte-avions HMS Indomitable, Formidable et HMS Hermes. La Marine impériale japonaise envoie une contre-force de 5 porte-avions et de 4 cuirassés pour attaquer les Britanniques à Colombo (Ceylan) : le 5 avril 1942, 315 avions embarqués japonais attaquent la base, mais les navires de la Royal Navy se sont déjà retirés à son Port T sur l’atoll Addu (Maldives), à 480 km au sud. La flotte anglaise monte cependant une contre-offensive mais est défaite par les porte-avions japonais : 80 bombardiers-torpilleurs Mitsubishi G4M attaquent et coulent les croiseurs HMS Cornwall  et HMS Dorsetshire. L’Hermes est également repéré et coulé à proximité de Ceylan le 9 avril. Le Japon contrôle désormais la totalité du Pacifique de l'ouest d’Hawaii à Ceylan.

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Le HMS Hermes, bombardé par l’aviation japonaise, coule au large de Batticaloa (Ceylan) (9 avril 1942)

La contre-offensive américaine (1942)

Les groupes aérien embarqué des porte-avions américains de la Task Force F lancent des contre-attaques qui, bien que limitées, affaiblissent la Kidô Butai. Ainsi, le 1er février 1942, les avions de l’USS Enterprise attaquent Kwajalein (îles Marshall), coulant 3 navires japonais et en endommageant d’autres, tandis que le 21 février, un avion de l’USS Lexington attaque Rabaul (Nouvelle-Guinée) et abat 5 bombardiers-torpilleurs Nakajima B5N Kate. D’autres raids sur Wake et l’île Marcus, l’un des points extrêmes du Japon, apprennent aux Américains que les aviateurs japonais ne sont pas en contact radio avec leur porte-avions (d’où des attaques souvent désordonnées) et découvrent l’existence de pilotes kamikaze.

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James Harold Doolittle dit Jimmy Doolittle (14 décembre 1896 - 27 septembre 1993) est un pilote américain, pionnier du développement de l'aviation de l'entre-deux-guerres. Officier de l'USAAF pendant la Seconde Guerre mondiale, il conçut et mena en avril 1942 un raid audacieux qui portera son nom, le raid de Doolittle le premier bombardement de Tokyo par les forces américaines.

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Un B-25 Mitchell de l'USAAF lancé de l’USS Hornet lors du raid de Doolittle sur Tokyo (18 avril 1942)

Afin de redonner du moral aux troupes en brisant l’invulnérabilité de l’archipel nippon, le lieutenant-colonel des United States Army Air Forces (USAAF) James H. Doolittle décide d’un raid (le raid de Doolittle) sur le Japon. À l’occasion de son premier tour d’opération de guerre, le Hornet rejoint le 13 avril 1942, au nord d’Hawaii, la Task Force 16 (comprenant l’Enterprise) chargée de son escorte. Le 18 avril 1942 il lance 16 bombardiers B-25 Mitchell pour une attaque moins stratégique que symbolique, destinée à laver l’affront de Pearl Harbor et qui doit surtout avoir un effet psychologique. Après le bombardement de Darwin, l’expansionnisme du Japon Showa le pousse à isoler l’Australie en capturant Port Moresby en Nouvelle-Guinée et Tulagi sur les Iles Salomon. Cependant, les États-Unis ont décrypté le code JN-25 et la Flotte du Pacifique est préparée.

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Le Shoho touché par une torpille d’un avion de l’USS Lexington (7 mai 1942)

Les porte-avions Lexington et Yorktown (Task-Force 17) appareillent avec 140 avions (42 Grumman F4F Wildcat, 74 Douglas SBD Dauntless, 25 TBD Devastator) pour la confrontation avec la Kidô Butai en mer de Corail. De son côté, la force d’invasion japonaise comprend les porte-avions Shokaku et Zuikaku basés à Port Moresby, plus le porte-avions léger Shoho à Tulagi comprenant 147 avions (54 Zero, 42 Aichi D3A, Kate). Les task-forces des belligérants s’affrontent le 7 mai 1942 et les Lexington et Yorktown lancent une attaque de 93 avions et coulent le Shoho de 13 bombes et 7 torpilles. Ayant eu vent du naufrage, les Japonais suspendent leur invasion de Port Moresby et envoient le Shokaku et le Zuikaku à la recherche des porte-avions, lançant 24 bombardier-torpilleur Nakajima B5N Kate, 36 bombardier en piqué Aichi D3A chasseur et 18 Mitsubishi A6M Zero. Par méprise, ils coulent le pétrolier USS Neosho, le destroyer USS Sims  et, plus tard dans la journée, lancent 27 avions qui, la nuit tombée tentent d’apponter sur les Lexington et Yorktown ! À l’aube du 8 mai, les task-forces se rencontrent. Le Zuikaku s’enfuit à la faveur du mauvais temps tandis que le Shokaku est touché par des bombardiers-torpilleurs Douglas SBD Dauntless qui endommagent fortement son pont d’envol. Les derniers avions américains décollent pour défendre leurs porte-avions, mais ils sont en trop petit nombre : seuls 17 Grumman F4F Wildcat sont en l'air.

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Le pont du USS Lexington avec des Douglas SBD Dauntless, des Grumman F4F Wildcat et des TBD Devastator alors que le hangar brûle (8 mai 1942)

Le Yorktown évite 8 torpilles mais est touché par une bombe. Quant au Lexington, une bombe fait exploser ses conduites de fioul et le stock de carburant aéronautique, embrasant le porte-avion de l’intérieur. Plutôt que de le laisser tomber en mains ennemies, il est abandonné avec la plupart de son équipage de 3 000 hommes et coulé par ses destroyers d’escorte. La bataille de la mer de Corail se termine par un match nul avec un porte-avions coulé et un endommagé dans chaque camp. Il en sera tout autrement aux îles Midway, un mois plus tard.

Midway : la chance tourne (1942)

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Raymond Ames Spruance (3 juillet, 1886 - 13 décembre, 1969) était un amiral de la Marine des États-Unis pendant la Seconde Guerre mondiale. Artisan de la victoire américaine lors de la bataille de Midway, il dirigea un grand nombre d'offensive dans le cadre de la campagne du Pacifique.

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Onze TBD de la VT-6 sur le pont d’envol de l’USS Enterprise peu avant l’attaque. Beaucoup seront abattus (4 juin 1942)

À l’origine, l’amiral Yamamoto désire attaquer les îles Midway, au centre du Pacifique, avant Port Moresby et Tulagi, avec pour but la destruction des porte-avions américains. Finalement, ce n'est qu'en juin 1942 que Yamamoto monte une opération de diversion aux Îles Aléoutiennes afin d'attirer les porte-avions américains, où les attendraient les Kaga, Akagi, Soryu et Hiryu. Pendant ce temps-là, les îles Midway seraient envahies par 12 transports de troupes, 2 cuirassés, le porte-avions Zuiho et la propre task-force à 7 cuirassés de Yamamoto.

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Frank Jack Fletcher, né le 29 avril 1885 à Marshalltown, Iowa, et mort le 25 avril 1973 à Bethesda, Maryland, est un amiral de la Marine des États-Unis qui a combattu pendant la Première et la Seconde Guerre mondiale.

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L’USS Lexington est abandonné par son équipage (8 mai 1942)

Ayant décrypté le code JN-25, la TF 16 (USS Enterprise et USS Hornet sous le commandement de l’amiral Raymond Spruance) et la TF 17 (composée du désormais rafistolé USS Yorktown sous le commandement de l’amiral Frank J. Fletcher) se positionnent à 500 km au nord-est des îles Midway pour attendre la flotte japonaise. Les groupes aériens totalisent 232 avions (111 SBD, 42 TBD Devastator, 79 Widcat) plus, sur l’atoll même, 119 avions de l’US Navy, des USAAF et des US Marine Corps, parmi lesquels les premiers bombardiers-torpilleurs TBF Avenger.

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Chūichi Nagumo) (25 mars 1887 - 6 juillet 1944) est un personnage important de la Marine impériale japonaise au début de la guerre du Pacifique.

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Le Hiryu en feu, avant d'être sabordé (5 juin 1942)

Du côté japonais, on dispose de 297 avions (120 Zero, 84 D3A1, 93 Kate). L’affrontement débute le 4 juin 1942 par une pagaille au sein des groupes aériens de la TF 16, qui se trouvent séparés et incapables de localiser les navires japonais et de la TF 17 où tous les TBD de la flottille VT-8 sont abattus sans placer une seule torpille, ainsi que 10 TBD de la VT-6 et les 12 TBD de la VT-3, si bien que les SBD arrivent sans escorte aérienne ! Le vice-amiral Chuichi Nagumo, mal informé, ordonne à deux reprises de modifier l’armement des avions qui encombrent les ponts d’envol de ses porte-avions tandis que les Zero, à court de carburant, demandent à apponter. C’est alors que surgissent les SBD qui larguent 39 bombes. Le Soryu est touché à 3 reprises, le Kaga 4 fois et tous deux coulent dans les heures qui suivent, tandis que l’Akagi est sabordé le 5 juin à l’aube. Non repéré, l’Hiryu endommage sérieusement le Yorktown, qui est achevé par le sous-marin I-168. L’Hiryu est finalement touché de 4 bombes lancées par des SBD et doit être sabordé. Finalement, en une vingtaine d’heures, la Marine impériale japonaise perd 4 porte-avions, un croiseur, 253 avions et 3 057 hommes (dont de nombreux pilotes expérimentés), contre un porte-avions, un destroyer, 98 avions et 307 hommes du côté américain. Yamamoto, qui avait fait la prédiction que le Japon aurait le dessus pendant six mois à un an avant d'être débordé par l’US Navy, avait raison : six mois après l’attaque de Pearl Harbor, l'expansionnisme du Japon Showa est définitivement stoppé dans le Pacifique Sud. La bataille de Midway est une victoire décisive.


28/12/2014
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